Chers lecteurs,
Chers abonnés,
Cher visiteur,
Mon dernier billet, intitulé La marche mais curieusement inscrit sur une immense vague, m’incite à vous parler d’une auteure-poète, Isabelle Bielecki, rencontrée lors d’un « sarau » (du portugais, comprenez assemblée, réunion, rassemblement populaire) de poésie à Bruxelles.
En l’écoutant et en lisant sa poésie, j’ai perçu un écho certain à ma propre plume, ce qui me conduit à vous la présenter aujourd’hui sur laplumefragile. Vous me direz ce que vous en pensez.
De surcroît, je bute (chose rare, mais qui arrive quand la réflexion et la raison viennent parasiter l’écriture créative) sur trois poèmes en cours. Les mots sont fous, ils n’en font qu’à leur tête, ce sont comme des enfants turbulents. Ils sont infernaux en ce moment. C’est comme si j’en avais trop et que je voulais les assembler sur un fil, tel un collier de perles, tous les enfiler en même temps. Peine perdue. J’ai donc préféré les laisser de côté pour vous proposer cette poésie-relais, en attendant que mes mots décantent, se reforment et se placent d’eux-mêmes pour composer ce qu’ils voudront, en harmonie tout de même, sans leur imposer la rigueur d’un rang d’oignons.
Par ailleurs, si j’ai décidé de vous parler d’Isabelle, c’est qu’elle fait partie d’un petit groupe appelé Les Saintes-nitouches qui, pour les opposer à ce que l’on entend d’ordinaire par « sainte-nitouche », osent écrire de la poésie érotique et s’adonnent à cet art en hommage à des femmes qui n’ont jamais connu l’amour velours et son désir charnel. Ce sont vos commentaires sous La marche, à vrai dire, qui m’ont encouragée à vous délivrer ces extraits, au nom de l’AMOUR, oui, encore l’amour, mais l’amour pas toujours, car certaines, de par « les interdits d’hier » et de demain peut-être, ne le connaîtront jamais comme nous, bienheureuses*, qui pouvons en jouir dans nos sociétés un peu évoluées, chaque jour, sous toutes ses formes et dans tous ses contours.
Ce dimanche, je vous laisse donc en compagnie de cette fine poétesse.
Affectueusement,
*l’usage exclusif du féminin est volontaire, bien entendu. La masculinité connaissant les plaisirs de l’amour depuis la nuit des temps.
f.
J’ose
L’impudeur dans le creux des vagues
Sans trêve roulée
Sans arrêt recommencée
Est-ce moi qui les caresse
Ou elles qui me lèchent
Est-ce l’écume complice
Qui m’y fait goûter
L’amer élixir des draps froissés
Et secoués à tous vents
Par une mer primesautière ?
*
C’est une vague l’amour
Petite moyenne ou grande
Cela dépend des jours
Elle lèche les doigts de pied
Ou elle renverse elle décoiffe
Mais d’où vient la première goutte
Ni de la pluie sur la corniche
Ni de ma bouche gourmande
Ni de la mer si inconstante
Ni d’une larme comme on croit
C’est une braise tombée d’ailleurs
Une chaleur qui ravage le cœur
Devient tempête et ouragan
Ou fait semblant
Au vrai ni eau ni braise
Serait-ce un autre élément ?
Il est dans le regard
C’est bien certain
Et quelque chose dans le visage
Dans le maintien
Dans l’air comme disent les gens
Et les poètes est-ce à dire
Qu’il naît de rien ?
J’imagine
Qu’un sourire se pose
Au bout de tes doigts
Un mendiant
Au bout de ta langue
Un désir de fleur
Au bout de ta vergeDans ma chute vers le néant
Tu m’entraves de murmures
M’enlaces de tes mots
Engourdis d’extase
Où rôdent souvenirs
D’anciennes ivresses volages
Corsets haut perchés
Narguant à gorge ronde
Tes rêves de pécher
Extraits de Plumes d’Icare (Memory Press) et Les jalousies d’Aphrodite (Ed. Le Coudrier)

Répondre à laplumefragile Annuler la réponse.