Billet un peu particulier. Expression brute. Sévère. Aride. La plume n’a pas voulu du papier. Le papier s’est refusé à la plume. Encre trop sèche, trop froide ? Le divorce n’est pas loin. La rage l’emporte : déchirure. Feuille noircie de ratures, d’une écriture saccadée, de caractères chinois qui n’ont pas réussi à raviver la plume. Feuille arrachée. Pourquoi le stylo n’a pas voulu épouser cette page nouvelle, lignée, au grain léger ? J’avais tant de choses à écrire. À présent, les mots se sont évadés. J’en rage !
Saint-Exupéry dit : « Je prends possession du monde par les mots. » Ce soir, je suis dépossédée; mon stylo m’a lâchée. Je veux reprendre possession de la plume, pour reprendre possession de mes mots, pour reprendre possession de ma liberté. Sans cette encre, sans ce mouvement fluide, finis les carnets libres, il ne restera que la note d’une condamnée, prisonnière de l’étanchéité d’un encrier.
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2 réflexions sur “la plume étanche

  1. Sec, aride, colérique, cinglant, despotique même…La rage rapportée dans les mots. Que ça soit fictif ou réellement éprouvé, l’émotion contenue se déverse.
    C’est peut-être juste ça d’ailleurs qu’il fallait écrire et les mots, malgré la rage contre eux, se sont portés volontaires 🙂 Peut-être qu’ils sont apparus pour s’offrir en pâture et que la rage se libère. Peut-être qu’il faut être reconnaissant envers les mots lorsqu’ils deviennent des épurateurs.

    « …reprendre possession de mes mots… »
    Oui, j’ai longtemps connu cette « rage » que vous mentionnez, cette incompréhension de la plume sèche.

    « ….pour reprendre possession de ma liberté. … »
    Tout le problème est là.

    Rien ne nous appartient dans la création littéraire. Ni l’inspiration, ni le talent, ni la maîtrise, ni l’euphorie, ni le moindre mot. Il n’y a pas de liberté quand on s’aventure dans ce territoire. C’est lui qui dicte ses lois. Nous sommes les jouets de son humeur et de son immensité.
    Qu’il devienne indifférent à notre présence et nous nous égarerons, comme des âmes littéraires en peine, qu’il devienne attentionné et nous nous envolerons dans les hautes sphères.

    « …il ne restera que la note d’une condamnée, prisonnière de l’étanchéité d’un encrier… »
    C’est parce que nous nous croyons libres que parfois survient l’impression d’enfermement.
    J’ai longtemps cogné contre les murs de la geôle quand « l’encrier » s’asséchait. Je ne le fais plus. Maintenant, je sais que les mots continuent à manigancer des histoires en secret, dans ma tête, sans se faire entendre, je sais qu’ils attendent d’être prêts pour jaillir. Je les laisse monter leur spectacle. J’attends que le rideau s’ouvre. Il finit toujours par s’ouvrir.

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    1. Cher Thierry, merci pour cette envolée de mots que Laplumefragile a fait couler.
      Liberté chimérique ? C’est un leitmotiv qu’il me plaira d’exploiter et d’exploiter encore dans mes textes. Que ce soit en amour, en écriture, en littérature, la liberté est-elle vécue ? éprouvée finalement ? Rien n’est moins sûr. Mais il est vrai qu’il y a toujours une issue, une porte dérobée, « un rideau qui finit toujours par s’ouvrir ». On est sauvé !

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